Edito 2021 - Visages
Les musiques africaines ont, comme les autres, des visages. Que ce soient ceux des grands maîtres, comme Ballaké Sissoko, Femi Kuti ou ceux des légendes comme le Super Mama Djombo, ces figures incarnent des petites ou grandes histoires musicales et sociétales. Musicales, parce que, quand les masques tombent, la scène reste ce lieu de vérité où l’artiste se confronte à ses propres limites et ses propres fantômes, face à un public que nul écran ne saurait remplacer. Sociétales, car, à travers les visages d’une Sona Jobarteh, d’une Leïla Martial, de Hewan Gebrewold et Haleluya Tekle Tsadik, de Poundo, ce sont des femmes puissantes qui cassent les portes et les codes des musiques africaines actuelles. Et si d’autres nouveaux visages, comme ceux des Go de Bamako, premier “ Girls Band Malien ”, viennent compléter cette galerie de portraits qu’un photographe de Sikasso n’aurait pas renié, Africolor continue de tresser les liens entre Nord et Sud, quand tout semble conspirer pour les dénouer. Avec KUTU, nouveau son éthio-urbain usiné par Théo Ceccaldi, le dantesque projet ÄKÄ, le concerto pour Soku de Clément Janinet, Afriquatuors qui accueille Sékouba Bambino, Sam Mangwana et Valérie Belinga, mais aussi la toute première venue de l’incroyable Abel Selaocoe, Africolor “ élargit ” nos oreilles par des rencontres musicales inédites. De quoi retrouver le goût des hybridations musicales, des vibrations dans les orteils et des sourires aux lèvres démasquées pour enfin s’enjailler à bouche “que-chantes-tu”.
Sébastien Lagrave