Un maelström de rythmes, de voix, d’instruments qui s’entrecroisent et se chevauchent. Ce chaos sonore donne l’illusion de déambuler dans un souk où tous les sons se mélangent. Nous sommes au Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM), à Marseille, où l’exposition « L’Orient sonore », donne à entendre des musiques du monde arabe menacées d’oubli.
La scénographie, conçue par Pierre Giner, a été adaptée au contexte sanitaire : chacun doit venir avec son propre casque pour écouter sur son téléphone portable, grâce à des codes QR semés sur le parcours, des extraits de la soixantaine d’enregistrements illustrant l’exposition. Pour ne rien perdre de ce qui se joue sur les différents écrans, il faut s’installer au plus près, sur les tapis, entrer quasiment dans l’image, car l’oreille a de multiples raisons ici de se laisser distraire. Une application, Orientsonore.fr, permet de prolonger l’écoute chez soi.
Campagnes d’enregistrement
Le premier personnage que l’on croise sur l’espace de 800 m2 consacré à l’exposition s’appelle Yūsuf al-Manyalawi (1850-1911). Référence du répertoire classique arabe, ce chanteur égyptien était désigné par les maisons de disques, comme « le Caruso de l’Orient ». Il en impose, planté devant le pavillon énorme d’un gramophone, sur une photo placée en début de parcours.
Le regard du visiteur glisse ensuite vers un écran dressé face à l’entrée : un groupe familial de musiciens et chanteurs du sud de l’Egypte y interprète, en s’accompagnant avec des vièles à archet et des percussions, l’Al Sirah Al-Hilaliyyah, un poème oral qui conte l’histoire de la migration de la tribu des bédouins Béni Hilal vers l’Afrique du Nord, à partir de l’Arabie, au Xe siècle. Il reste très peu de chanteurs connaissant la totalité de cette épopée, précise une note près de l’écran.
Voyage dans le temps, l’exposition met en lumière un patrimoine et des traditions musicales méconnues du monde arabe, à travers une sélection de 78-tours (dont des originaux exposés sous des plexiglas), des panneaux explicatifs trilingues (français, anglais, arabe), des photos d’interprètes, quelques objets et une douzaine d’installations vidéo. Elle donne à entendre et comprendre « des musiques oubliées qui ont foisonné durant le XIXe siècle puis sont tombées dans un oubli assourdissant à partir des années 1930 », commente Kamal Kassar, commissaire général de l’exposition, dont un entretien filmé est intégré au parcours.
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