La guitare fait sa transition écologique

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La guitare fait sa transition écologique

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Adrien Collet dans son atelier de lutherie, à Paris
Adrien Collet dans son atelier de lutherie, à Paris
- Adrien Collet

La Journée mondiale de la vie sauvage, le 3 mars, est dédiée à la défense de la faune et de la flore, un sujet qui concerne également le monde musical et la facture instrumentale. Parmi les instruments concernés, la guitare voit fleurir de plus en plus d’alternatives écologiques.

Avec plus de 20 millions d’exemplaires produits chaque année, la guitare est l’un des instruments les plus vendus au monde (derrière l’harmonica !). Une popularité qui explique l'engagement particulier des fabricants pour des alternatives de construction respectueuses de la biodiversité. Palissandre, ébène, pernambouc… Dans le monde de la corde pincée, les bois exotiques traditionnels n’ont plus pignon sur rue. 

Bois locaux, bambou, fibre de lin…

Pour Jacques Carbonneaux, chargé de mission pour la Chambre syndicale de la facture instrumentale (CSFI), les alternatives existent : « Les luthiers se tournent vers les bois de nos régions, des bois récupérés d’autres produits du bois qui sont arrivés en fin de vie, les matériaux de substitution comme le bambou ou la fibre de lin.» Les fabricants des différents continents n’hésitent pas à se rassembler pour prendre la question écologique à bras le corps.  

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En France, l’Association professionnelle des luthiers artisans (APLG), regroupe une partie des 500 fabricants de l’Hexagone. Elle a créé une commission « Bois et matériaux », qui est en relation avec d’autres associations internationales et les grands fabricants américains, comme Fender ou les guitares Taylor. « L’objectif est de faire face aux réglementations internationales et d’engager des actions concrètes pour la préservation des forêts, insiste Jacques Carbonneaux. Les associations européennes de luthiers sont très actives. » L’European Guitar Builders a ainsi lancé le « Local Wood Challenge », qui propose aux luthiers de l’UE de fabriquer des guitares en bois 100% locaux et de les faire essayer aux musiciens dans différents salons.

Une étude européenne pour comparer les bois

Et comment sonnent-elles, ces guitares ? Tout l’enjeu est de convaincre les musiciens. Une étude d’envergure européenne, la Leonardo Guitar Research, a été lancée pour prouver au public, recherches scientifiques à l’appui, que les instruments construits à partir de bois régionaux peuvent être aussi performants que les instruments construits avec des bois tropicaux. « Les résultats ont été concluants et ont démontré que, quel que soit le bois utilisé, les qualités acoustiques et mécaniques sont sensiblement les mêmes. Qu’il soit tropical ou pas, peu importe, ça fonctionne. C’est aux musiciens maintenant de prendre conscience de cet état de fait. », insiste Jacques Carbonneaux. 

Dans son atelier parisien, Adrien Collet travaille plusieurs variétés de bois locaux. « Nous les luthiers, nous sommes les premiers interlocuteurs pour éduquer les musiciens aux alternatives qui existent : j’utilise l’épicéa européen, l’érable, qui est un bois traditionnel des instruments du quatuor, mais on peut aussi faire de très belles guitares avec du poirier figuré et du frêne olivier. Le cormier est une bonne alternative à l’ébène. Il fonctionne très bien. » 

Récupération et circuits courts

Les fabricants de guitare n’hésitent pas non plus à jouer, comme Adrien Collet, la carte de la récupération de bois anciens : « J’arrive à me fournir d’une manière plus équitable en récupérant de vieux stocks de luthiers, explique le jeune artisan. J’ai récemment récupéré une grande poutre en acajou qui a été coupée dans les années 1960. C’est du recyclage et avec une poutre comme celle-là, j’en ai pour toute ma carrière de luthier ! » 

Adrien Collet prône également le circuit-court : « Je me déplace dans les scieries, je vais acheter du bois dans les Alpes, puis un musicien, qui n’habite pas loin de mon atelier, vient faire fabriquer sa guitare chez moi, plutôt que de l’acheter sur internet. Tout cela, c’est du circuit court : pas de surconsommation, mais du lien et, surtout, du sens. »

Bois locaux, récupération, circuits courts : les guitaristes pourront s’informer sur ces alternatives plus respectueuses de l’environnement du 20 au 22 mars, au salon de la belle guitare de Montrouge, dans les Hauts-de-Seine. Plusieurs luthiers y présenteront des guitares réalisées avec des bois 100% locaux.

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